Je suis en vacances à la Guadeloupe chez mon pote Christian, pêcheur de Marlin à Deshaies. Mais cette année contrairement aux séjours précédents, mon objectif n’est pas le marlin. Je suis venu avec ma Sage RPLX+ soie de 8 (celle qui a matée tant de Carangues et de baby tarpons au Gabon) pour tenter le Bonefish, poisson mythique des moucheurs du monde …
… Rendez vous est pris avec Alexis ce 21 Décembre 2006 a 7h00 du matin pour ma première sortie Bonefish. C’est un des rares poissons « mouchables » que je n’ai pas eu encore loisir de combattre sur une canne à mouche. J’ai lu tellement de choses sur le rush explosif et la combativité phénoménale de ce poisson que je suis plus qu’impatient d’en découdre, sachant toutefois que, comme pour toute première tentative, il faut rester réaliste et ne pas s’emballer sur des certitudes: Je suis à la Guadeloupe, pas aux Bahamas ou à Belize les hot spots pour la traque du Bonefish et du Permit sur les flats.
Apres les présentations d’usage et quelques conseils avisés d’Alexis nous rentrons dans l’eau et progressons vers le premier flats, de l’eau à mi-genoux. La traque commence. Très rapidement je suis victime des premières hallucinations. Alexis m’indique déjà un Permit en plein tailing, la caudale perçant la surface de l’eau. Première tentative sur ce seigneur des flats avec un posé un peu fébrile d’une imitation de crabe. Pas de réaction. Nouvelle tentative sans plus de succès. Et là les choses s’accélèrent. Ce n’est pas un Permit qui maraude dans la zone mais des schools de permits. On en comptera plus de 40 dans la matinée, tous trahis par leur caudale se balançant au dessus de la surface, en train de coincer un crabe sur le fond, certains d’après Alexis pesant plus de 15 lbs. « Le Belize est pulvérisé, les Bahamas ridiculisés ». Le pêcheur aussi. Cet animal est diabolique et je commence à comprendre la véritable adoration que louent les moucheurs à ce poisson mythique. Respect, il ne s’offrira pas à ma première sortie sur un flat. Avec tout ça on en aurait presque oublié les Bonefishs. Passage du cerveau en mode Bonefish, les caudales des permits attendront. Concentration derrière les lunettes polarisantes sous la surface de l’eau, telle est la procédure mentale que nous opérons. Et là chapeau bas Mr le guide. Il voit sous l’eau, anticipe le moindre mouvement suspect, et vous lance d’une voix assurée, alors que vous n’avez toujours pas eu le moindre indice, « là , 7 m à 10 heures, 3 Bonefishs – Shoot, Ok, attend, attend,…, strip, strip, , … relance, 9 m à 9 heures, Ok, » Je n’ai toujours rien vu et Alexis semble lire leur trajectoire au centimètre prêt – C’est pas possible, il se fout de ma gu… « strip, strip, stop » – Ca y est, je vois une forme allongée, un Bonefish, tout va très vite alors, ça bloque, ferrage soie en main, grand strip, canne à l’horizontale. Alexis crie « lâche la soie !! » Pas le choix, c’est l’explosion, les quelques mètres de soie dans mes pieds s’envolent et passent par miracle les obstacles et autres pièges que représentent le moulinet et les anneaux. Première étape franchie. Le rush est alors violent, furieux, inimaginable, rien de comparable, en proportion avec la taille de ce poisson, avec tout ce que j’ai pu tenir auparavant sur une canne à mouche. Mes saumons d’Ecosse sont des enfants de cœur en comparaison. En quelques secondes j’ai 100m de backing dehors sans comprendre encore ce qui m’est arrivé. Le Bonefish est parti du bon coté vers la plage et non vers la barrière de corail. Il semble, d’un gabarit respectable. Il ralenti enfin sa course sous le regard inquiet d’Alexis vers ma bobine dangereusement amaigrie. Je reprend mes esprits et commence le combat, rentre du backing avant d’encaisser encore 3 ou 4 rush plus courts mais tout aussi explosifs, pas droit a l’erreur dans la gestion du moulinet. Il arrive enfin, épuisé, rendu. Quelle merveille, mon premier Bonefish, traité avec tous les égards, petites photos, pesée délicate avec le bogagrip, remise à l’eau. Fusée argentée de 5 lbs. Heureux le pêcheur et son guide. La suite de la matinée sera toute aussi exaltante et passionnante, et sera agrémentée d’une autre prise, un bonefish plus petit mais d’une puissance d’autant plus surprenante, d’un autre décroché et de multiples échecs sur d’autres Bonefishs et bons nombres de Permits. Que dire d’autre? It was just great !!! Fantastique sortie sur les flats de Guadeloupe à la richesse insoupçonnée. 2 jours plus tard je suis à nouveau à pied d’oeuvre arpentant le flat, scrutant la surface à la recherche du moindre signe suspect trahissant la présence du Bone. Les conseils d’Alexis ont été enregistrés et la chance me sourie encore. Après quelques ratés par manque de rèactivité, je suis enfin en excellente position, en visuel sur un petit groupe de 3 ou 4 bonefish de bonne taille s’approchant vers moi. Cast, je laisse descendre la crasy Charlie, animation, bang, le 1er le plus gros de la troupe a pris. Explosion, tout ce passe bien, par miracle, les boucles de soie franchissent sans obstacles les pièges tendus tels que la manivelle du moulinet ou le 1er anneau de la canne. Le rush est foudrayant, inimaginable. Je cours pour essayer d’esquiver une patate de corail, ça passe. Le Bone se rend après plusieurs rushs et manoeuvres périlleuses. Un baigneur ayant obervé mon étrange manège depuis la plage vient à ma rencontre et me tire le portrait avec ce superbe poisson. C’est un gros. Heureux le Nico.